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Une chance pour vivre l'évangile

June 26 2012 , Written by François Lévêque

Comment réagir face à ce qui se passe dans l'église plus visiblement dans ces derniers temps qu'auparavant? Se plaindre? Déjà fait. Dénoncer? Eh bien oui, en essayant toujours de ne pas blesser la charité ou de ne pas nommer le « pécheur »! Peut-être que ces moments nous donnent encore une autre chance de vivre l'Évangile et de continuer à aimer l'Eglise, même si nous étions prêts à conclure qu'elle est imperméable à l'Evangile, car irréformable ...

Enzo Bianchi, moine et prieur de Bose

Enzo Bianchi, moine et prieur de Bose

Nous savons que l'église n'est pas une réalité intemporelle créée par la volonté d'un fondateur, elle est une réalité historique, elle est histoire et elle fait l'histoire. Nous savons aussi que dans le lieu désigné pour la justice, l'iniquité peut régner (cf. Eccl 3.16) et qu'elle était déjà présente dans le groupe des Douze appelé par Jésus à sa suite, ayant pris part à sa vie, dont la pierre angulaire a connu la tentation de réagir comme Satan: les Douze sont lents à croire, mais ils sont prêts à renier, et pour l'un d'entre eux, même, à trahir Jésus! En écoutant les paroles de Jésus, nous savons aussi que dans le champ, dans l'espace ecclésial, le blé et l'ivraie croissent ensemble, que les mauvaises herbes ne doivent pas être éradiquées, mais que l'on doit attendre, attendre encore, et porter le regard vers ce qui sera le fruit de la récolte.

Alors, pourquoi souffrir? Pourquoi nous lamenter, de cette lamentation prophétique qui était déjà sur les lèvres et dans le cœur des prophètes de l'Ancien Testament, de Jésus lui-même quand il pleurait sur Jérusalem, ou des hommes de l'église comme Basile le Grand ou d'autres Pères de l'Orient comme de l'Occident? Ces dernières années, nous avons vu la détérioration qui a eu lieu devant nos yeux: la calomnie et la critique féroces dans un monde souterrain, perfide, alimentées par des blogs et des journalistes acquis à différentes factions, portés à la diffamation d'hommes et de femmes qui ont eu le seul tort d'être fidèles et non flatteurs, de ne pas chercher le pouvoir ou l'appui des différentes curies ecclésiales. Nous avons également remarqué que le cri de certains - y compris celui du cardinal Ratzinger lui-même, du moins à partir de la Via Crucis célébrée à la veille de la mort de Jean-Paul II - qui a dénoncé le malaise ecclésial, le carriérisme, la cupidité et le pouvoir immédiatement après une série d'événements qui ont été à l'origine de ces plaintes et de ces dénonciations.

Et pourtant: que faire, que dire, en face d'une église qui semble avoir perdu, pour beaucoup de ses dirigeants qui portent le fardeau du service de tous, la tension vers l'unité et la charité?

Si jadis, nous avons créé des athées à cause de l'image déformée de Dieu que nous avions fabriquée et prêchée, aujourd'hui, alors nous ne sommes plus significatifs en tant que chrétiens, nous nous trouvons paralysés par le spectacle que nous offrons. Les hommes et les femmes qui sont en dehors de l'église sont confirmés dans leur éloignement par ceux qui affirment s'être engagés pour la nouvelle évangélisation, tandis que de nombreux chrétiens quittent cette même église sans faire de bruit, sans se plaindre ou sans tenter de vivre leur foi "malgré" l'église, "etsi ecclesia non daretur." 
 Benoît XVI, dans son Message pour le Carême 2012, nous invite à redécouvrir la mesure de la correction fraternelle comme un élément constitutif de la vie chrétienne. Ce besoin de correction concerne la personne comme la communauté chrétienne dans son ensemble, l'ekklesia. Et la correction se fait par la parole et par l'acte, comme l'évangélisation, la liturgie, l'histoire du salut.

La dégradation de la vie ecclésiale est avant tout abandon de la Parole de Dieu, de la position salvifique de l'écoute, où se concentre toute l'existence de l'église, et d'où seulement peut découler toute prise de parole. Mais la primauté de la Parole de Dieu est telle non seulement quand elle est à l'origine de la parole de prédication et d'enseignement de l'église, mais aussi quand elle ajuste et corrige la parole au sein de l'Eglise, quand elle devient l'ascèse de la parole de l'église pour construire une communication «évangélique» qui échappe à la duplicité, au mensonge, aux manipulations, à la flatterie. La candeur, la parresía, la transparence, et aussi le partage de la parole, la dimension communautaire et collégiale, sont la réponse de l'Église à la Parole de Dieu qui cherche la communion et engendre la conversion de la parole humaine à l'exemple de Jésus, dont les gens disaient: « Jamais homme n'a parlé ainsi .» (Jn 7:46).

On disait également de Jésus: "Il a bien fait toutes choses" (Mc 7,37). A l'écoute de la Parole de Dieu, de nombreux, de très nombreux chrétiens anonymes font le bien, suivant véritablement le magistère, sans le feu des projecteurs des médias, et ceux-ci sont la sainte Église de Dieu, même lorsqu'il est caché comme un cep planté dans la terre aride. Il y a des martyrs, des chrétiens persécutés, il y a des hommes et des femmes qui se lèvent le matin pour travailler, qui ont des difficultés à donner naissance à des enfants et à les garder, il y a des personnes qui, chaque jour qui passe, se penchent sur leurs frères et sœurs qui souffrent avec amour, il y a beaucoup de chrétiens qui souffrent profondément de leur propre incapacité à se conformer à l'Evangile, mais tous ceux-ci ne font pas les gros titres, personne ne les regarde, personne ne les remarque, personne ne les écoute...

Cependant, est-ce que cela n'est pas déjà arrivé à ce "Juif marginal" (c'est la citation du titre d'un livre apparut en français avec le titre Un certain juif, Meier, ndr) qui se nommait Jésus de Nazareth? Qui l'a remarqué au cours de sa vie? Qui s'est intéressé à son histoire tissée du seul service de l'amour et de la fidélité à ses frères? Seuls quelques dizaines de disciples au milieu d'une foule qui venait juste pour obtenir un peu de pain et pour voir quelques miracles ...

Que devons-nous faire dans cette situation si amère? Écouter de nouveau la Parole de Dieu et,écouter l'enseignement silencieux des journaux chrétiens, et ainsi résister au diable, le diviseur, en menant le bon combat de la foi tous les jours, en se fiant uniquement au Seigneur Jésus et en se rappelant les paroles du prophète Jérémie: "Maudit soit l'homme qui se confie dans l'homme" (Jérémie 17,5). Il nous reste à commencer notre vie chrétienne en nous redisant à nous-mêmes: "aujourd'hui, c'est le premier jour du reste de ma vie chrétienne!"

Article paru dans JESUS, mars 2012

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